« A House doesn't make a home »
La jeune fille avait passé une journée des plus pénibles, mais comme tous les soirs depuis des mois maintenant elle avait un masque qu’elle mettait à l’entrée de la maison des Beckett. Elle ne devait pas laisser transparaitre ses soucis. Il n’y avait toujours eu que sa mère et elle, son père n’avait jamais assumé un enfant, alors elle n’aimait pas causer du souci à sa mère. Et pourtant il y aurait eu matière à. Mais elle n’était pas comme ça elle … c’était pas son genre de se plaindre ou se faire plaindre, elle subissait en silence, dans l’ombre. Et ce soir elle essayerait de mettre un sourire sur son visage pour que sa mère ne soupçonne rien. « Tu te moques de moi Erin !? » la jeune fille fronçait les sourcils. Sa mère était devant l’ordinateur et rien du tout pouvait la préparer à ce qui se passait. Elle passait sa main dans ses cheveux qui étaient agrémentés de quelques mèches de cheveux rouges. « M’appelle pas Erin maman, tu sais que j’aime pas ! Je m’appelle Hazel. Déjà papa et toi vous avez mal choisi mes prénoms alors c’est pas une raison pour en plus insister dessus. » mais la mère d’Erin se levait n’en pouvant plus de l’insolence de sa fille. « je t’ai dit de venir tout de suite, tu ne discutes pas jeune fille ! » C’est là qu’elle se rendit compte que sa mère ne rigolait vraiment pas. « Qu’est ce qui se passe maman? » demanda t’elle consciente qu’elle n’avait pas été proche de cette dernière depuis quelques mois qu’elle était entrée dans le groupe des « filles populaires du lycée ». Sa mère se leva et prenant l’ordinateur portable le planta devant les yeux de sa fille. Lisant à voix haute d’une voix outrée « Miss Hazelnut vous satisfait quel que soit votre âge. Quel que soit votre désir ! » les yeux écarquillés, Hazel regardait sa mère sans ne savoir quoi dire. « J’espère que tu as une très bonne explication à ça jeune Erin … »
C’était un peu plus compliqué que ça hein … et pour ça fallait revenir quelques années en arrière
D’aussi loin qu’elle s’en souvient Hazel a connu Agnès Solis. Sa voisine, la fille de la meilleure amie de sa mère. Elles sont différentes au possible. Agnès est extravertie, belle et le sait. Hazel est plus renfermée, jolie mais n’en est pas consciente. Et pourtant elles auraient eu tout pour être amies. Leurs mères se sont rencontrées en salle de préparation à l’accouchement. En effet les deux futures mères se sont rapprochées quand leurs compagnons respectifs ont décidé de mettre les voiles à l’annonce d’un futur bébé. Ce qui les a fragilisé chacune de leur côté, les a renforcées ensemble. Aussi, avant même de venir au monde, les deux filles se côtoyaient beaucoup, sans avoir vraiment le choix. Agnès est née trois jours avant Hazel. Et depuis elles ne se sont jamais séparées. Et pourtant croyez moi, Hazel aurait préféré ne jamais avoir la demoiselle dans sa vie. Mais on ne choisit pas. Forcées de cohabiter quand leurs mères faisaient des soirées amies. Obligées de partager des babysitter si leurs génitrices partaient au cinéma ensemble. Elles se sont toujours retrouvées dans les pattes l’une de l’autre sans le désirer. Parce que si Hazel n’aime pas Agnès, cette dernière ne le lui rend que très bien.
Rapidement tout le monde félicite Agnès pour sa grande beauté et son petit accent qui fait fondre tout le mode. Hazel elle est plutôt considérée comme une artistique et originale. Ce qui pour elle équivaut à dire qu’elle est laide, mais de manière à ne pas la blesser. Sauf qu’elle trouve ça encore pire en définitive. Les deux filles sont aussi différentes que la nuit et le jour. Là ou Agnès a une floppée d’amies et amis, Hazel se retrouve souvent en tête à tête avec ses peluches. Mais ça ne la dérange pas. Pas le moins du monde. Toujours collée à l’hispanique au sang chaud ne fais qu’agacer la jeune Beckett qui ne peut même pas le dire à sa mère au vu du lien avec la mère d’Agnès.
Le refuge que trouvera la jeune fille est la nourriture. Pas la manger contrairement à ce que l’on pourrait penser. Bien que comme tout un chacun elle mange raisonnablement. Mais la cuisine. Cuisiner la détend et ce depuis toujours. On ne compte pas les fois ou elle a imaginé couper en rondelle une carotte qui serait la tête d’Agnès. Il lui arrive souvent de faire des plats pour les jeter dans la seconde ou ils étaient finis, tout simplement parce que c’était le fait de les faire qui la détendait. Et puis de recommencer … encore et encore. Jusqu’à ce que la colère disparaisse, que la frustration se dissipe, que son cœur cesse de s’emballer.
Les seuls petits moments qu’elle aurait pu apprécier n’ont jamais été probant non plus. Parce que passer toutes ses vacances à Buffalo quand on est une fille de la ville comme Hazel c’est quand même assez difficile. Surtout quand on est seul avec la vieille tante Inès et sa fille qui ne font que rabâcher l’historie de la ville. On a rêvé mieux comme vacances. Surtout quand, de retour à New-York, Agnès se vante des vacances de folie en Guyane. C’était plus fort qu’elle, il fallait toujours que l’hispanique soit meilleure qu’Hazel. Et ce même si cette dernière n’a jamais cherché aucune compétition avec elle.
Le collège et le lycée se sont succédés comme deux plaies pour Hazel qui était la cible des attaques incessante de sa « voisine ». Déjà refermée sur elle et plutôt timide, grâce aux dires d’Agnès et au bouche à oreille, tout le monde se moque d’elle. Rien n’y passe. Ni l’habitude d’Haze de dormir avec sa mère jusqu’à ses six ans. Ni son doudou « monsieur fluffy ». Mais Hazel a toujours tout subi en courbant l’échine, ne pas répondre a toujours été son meilleur atout. Mais malheureusement ça n’a jamais découragé Agnès qui revenait toujours avec un nouveau « détail croustillant » sur la pauvre Beckett dont on finissait toujours par se moquer. Mais peut être que tout ça aurait pu être plus facilement gérable si Mme Beckett avait été consciente de quoi que ce soir. Mais Agnès jouant les petits anges si Hazel avait le malheur de se plaindre elle se voyait demander de « ne pas faire de gamineries » et même parfois « être un peu plus comme Agnès ».
Mais si encore s’en était resté là. C’était plutôt bon enfant à l’époque …
Il a fallu qu’il y a un an, à peu près au moment de l’entrée d’Hazel en faculté d’Arts, Agnès en décide autrement. Si la vie d’Haze était déjà un enfer avant, ça a pris des proportions titanesques. « je suis désolée Hazel … pour tout tu sais. » et elle avait vraiment l’air honnête la saloperie. Elle avait pris son air le plus sérieux, et elle avait même des larmes aux yeux. Sauf que si Haze connaissait bien Agnès, elle était résolument dans la croyance que l’être humain peut se racheter. Sauf que … c’est d’Agnès dont on parle. « Ce … c’est pas grave … je … nos mères sont amies, on devrait pouvoir l’être nous aussi. » elle soupirait un peu, esquissait un petit sourire et intérieurement ne se doutait pas qu’Agnès n’était pas sincère. Comment pourrait elle ? Peut être en se souvenant du passé. Et elle a été intégrée dans la bande. On lui a fait une place. On lui a appris a choisir de nouvelles fringues, lui a inculqué la « mode », les débardeurs, les shorts minimement mini et qui pourtant lui dessinaient de très belles jambes. Au moins ca a eu le mérite de lui faire découvrir sa féminité. Ils l’ont intégrée et elle s’est sentie aimée, entourée. Chose qui ne lui était jamais arrivée. « Je suis heureuse de faire partie du groupe » répétait elle chez le coiffeur quand on lui faisait ses fameuses mèches rouges. « Tu sais je suis sûre que tu plais à Barth ! » elle l’avait regardé avec de grands yeux. Quoi Barth !? C’était pas possible, elle n’y croyait pas et pourtant toutes les filles de la bande avaient réussi à la convaincre que c’était le cas. « Mais si, tu vois pas comment il te regarde quand tu as le dos tourné, je te promet qu’il est intéressé par toi ! » elle avait haussé les épaules, elle n’y croyait pas, elle n’avait pas eu beaucoup d’expériences amoureuses, ni beaucoup d’occasions d’en avoir. Et puis elle n’avait jamais trouvé de réel intérêt aux garçons. « N’importe quoi tu sa- » son téléphone la coupa au milieu de sa phrase. « Attends mon téléphone sonne. Oui ? » « Bonjour Hazelnut, alors comme ça t’es disponible ce soir ! On se retrouve chez toi ou chez moi !? » « Heu je crois que vous vous êtes trompé de numéro monsieur » et elle raccroche sans voir l’air hilare d’Agnès dans son dos. « Mais si je te jure. Avec les filles on t’a organisé un petit rendez vous avec lui ! » elle fronce les sourcils et n’aime pas vraiment ça. « Je te jure il vient te chercher en moto ce soir, pour une petite balade en amoureux. » toutes les filles émirent un petit sifflement admiratif et équivoque alors que la coiffeuse invitait Hazel à aller au bac pour rincer ses cheveux.
[…]
Comme prévu Barth était passé la chercher, à l’heure prévue. « Bonsoir Hazel. Ca te va très bien tes mèches rouges » dit il pour la mettre en confiance. « Je suis désolé j’ai qu’un casque pour moi ! Ca te dérange pas de rouler sans hein ! » lui dit il sans lui poser réellement la question. Elle s’était faite toute belle, une petite robe noire, des chaussures à talons. Et son petit air timide. « Non c’est pas grave » mentit-elle. A vingt quatre ans elle était très prudente et pourtant, elle se laissait embarquer comme pas possible dans plein de trucs ces derniers temps. « Allez monte ma belle » dit-il en lui faisait signe et elle obtempère. Serrée contre lui elle se prend a pouvoir avoir elle même son petit bonheur. Se disant qu’Agnès n’est pas aussi terrible que ça tout compte fait. « Voilà on est arrivés ! » dit Barth en arrêtant l’engin et l’ammenant à une petite clairière dans Central Park. A quelques dix blocs de chez elle. « Oh c’est magnifique ! » d’émerveilla t’elle à la vue de la petite table de picnic dressée à priori que pour eux. Il l’invita a s’asseoir à ses côtés, de manière romantique, tout était parfait. Il fit des allusions, et au dernier moment, se pencha vers elle, fermant les yeux, elle espérait un baiser. Mais elle ne reçut qu’un flash d’appareil photo. « Allez CHEEEEEEESE » choquée et dépitée, elle vit Agnès et le groupe d’amis qu’elle pensait s’être fait depuis un an hilares autour d’elle. Barth lui aussi était en train de rire, de se moquer d’elle. Les joues d’Hazel s’empourprèrent immédiatement et elle se releva. « Allez t’en vas pas Hazelnut, c’était drôle quand même, tu peux au moins l’avouer ! » soupirant, elle prit enfin son courage à deux mains et rebroussa chemin pour se planter devant l’hispanique et venir lui coller une droite dans la figure. « Me prend plus pour une conne Agnès. » cette dernière s’arrêta de parler, peut être pour la première fois de sa vie mais repris bien vite. « Ca … ça tu me le paiera Hazel, je te le promet ! » Elle sauta rapidement sur la moto de Barth et tous la laissèrent, plantée au milieu de Central Park. Dans le noir. Avec la pluie qui commence à tomber.
Et bien sûr ça a eu les conséquences qu’on connaît à présent …
Agnès est rentrée chez elle en pleurant et est allée se plaindre à Mme Beckett. Lui racontant qu’Hazel l’avait giflée, qu’elle avait même le bleu pour le prouver. Elle a prétexté qu’elle s’était prise à elle quand elle avait essayé de lui faire comprendre que vendre son corps sur internet n’était pas la meilleure solution. Qu’elle avait voulu à tout prix aider Hazel, et qu’elle n’avait eu pour réponse que ce coup de poing. Mme Beckett a été furieuse et demandé l’adresse à Agnès qui s’est empressé d’afficher sur l’ordinateur le profil d’escort-girl qu’elle et Barth avaient mis au point depuis quelques mois incluant de vraies photos et ses coordonnées. En deux temps trois mouvement, hors d’elle Mme Beckett avait appelé Tante Inès lui disant qu’Hazel arriverait à la première heure le lendemain. Il va falloir la recadrer. Et la sevrer. Parce que oui bien sûr pourquoi vendre son corps sur internet si ce n’est pour se payer de la dope …