Dawson. Un nom taché par des rumeurs à Buffalo, un nom apprécié à Boston. Deux familles tellement différentes pour deux chefs de famille au sang commun : deux frères.
Mon père et mon oncle sont nés ici, à Buffalo. Tous les deux ont grandis parmi les champs et les fleurs. La campagne faisait partie de leur vie. Jusqu’à ses 18 ans, mon père aimait toute cette verdure qui se trouvait autour de lui mais il a eu la chance ou la malchance de se rendre à Seattle le temps d’une semaine pour un stage. Il a comme eu un coup de cœur pour la modernité, l’architecture que l’on trouvait dans une grande ville. De retour à Buffalo, ce qu’il voulait était repartir rapidement. Très rapidement. Chose qu’il a fait dès qu’il a pu s’inscrire à l’université.
Boston. Une ville bien loin de chez lui et pourtant c’est ce qu’il recherchait. Très vite, il prit ses marques. Très vite, les femmes venaient à lui. Or une seule lui avait tapé dans l’œil : ma mère. Ces deux-là se sont tournés autour avant de se déclarer. Il l’avait rencontrée lors d’une soirée étudiante et tout de suite, il avait su qu’elle serait sa femme. Elle avait pensé la même chose de lui.
Cinq ans après la fin de leurs études, mon père et ma mère se sont décidés à se marier, au bonheur de leurs familles respectives. La famille de mon père avait enfin son deuxième fils qui se mariait et avec une femme de son âge. Enfin un de leurs fils ne leur ramenait pas une gamine. Une gamine qu’ils avaient pourtant acceptée.
Cette femme mis au monde une petite blonde quelques mois après ma mère. A la différence de cette dernière, ma tante enfantait pour la quatrième fois. Cette petite blonde et moi étions nés la même année. Un présage.
Roxanne et moi habitions loin de l’un de l’autre et pourtant notre relation était fusionnelle. Nous étions proches. « Très proches » disaient certains, « trop proches » disaient d’autres. Chaque année, nous nous retrouvions pour Thanksgiving à Buffalo. Chaque année ce n’était qu’un cours séjour mais bien assez long pour profiter de chaque instant.
Notre relation se renforça encore plus une certaine année. L’année de nos dix ans, sa mère, ma tante mourut. La famille s’est alors déchirée. Mon père était devenu fragile suite aux accusations perpétrées par cette mort suspecte. Il n’appréciait pas que son frère puisse être accusé à tort. Quant à ma mère, elle avait perdu une amie très chère. Cette mort avait été encore bien plus douloureuse que toutes celles auparavant.
Même si notre relation était devenue encore plus fusionnelle qu’elle ne l’était déjà, je ne souhaitais plus remettre les pieds à Buffalo suite à la mort de ma tante au risque de faire du mal à ma cousine.
Je n’ai jamais vraiment dit la raison pour laquelle je ne voulais pas retourner dans la ville natale de mon père. En réalité, j’avais peur de mon oncle. Il ne m’inspirait pas confiance. Je voulais seulement garder contact avec ma couine. Les autres ne valaient plus rien pour moi. Ils avaient comme disparus de ma mémoire.
Etant fils unique, mes parents avaient accepté ma requête. Ma mère ne souhaitait plus vraiment revoir cette petite ville. Quant à mon père, il avait encore beaucoup de mal à oublier les accusations qu’avait subi mon oncle.
Puisque nous n’allions plus à la campagne pour les réunions de famille, mes parents se sont plongés dans le travail oubliant leur fils. Un fils qui traversait le moment le plus difficile de sa vie : l’adolescence. Ce fut un passage critique autant que pour moi que pour ma cousine. Nous n’avions pas les mêmes problèmes mais nous ressentions nos mal-être. Dans chaque lettre qu’elle m’envoyait, elle s’exprimait sur cette nouvelle femme qui partageait la vie de son père. Une femme que je haïssais. De mon côté, c’est le monde de la délinquance qui s’est ouvert à moi. Je faisais connerie sur connerie et mes parents ne voyaient rien. Seule ma cousine essayait de me faire comprendre le mal que je répandais. C’est quand j’ai commencé à me faire connaitre des services de police que mes parents se sont rendus compte que j’allais mal. Ils ont alors essayé de chercher pourquoi j’étais devenu ainsi. Quand la psy a rendu son verdict, j’étais juste un ado mal dans sa peau. Un ado qui cherchait ses marques dans le monde des adultes. Un monde dans lequel qu’il allait bientôt rentrer.
Le temps du lycée était révolu, je venais d’entrer à l’université. Malgré ma délinquance et mes conneries, j’avais pu entrer dans la section ingénierie de l’université de la ville, au plus grand bonheur de mes parents. J’empruntais le chemin que mon père avait suivi auparavant. Ce dernier étant devenu ingénieur, ma mère ne pouvait qu’être fière de ses deux hommes. Pourtant au fond de moi, il manquait quelque chose, quelqu’un. Je n’en savais rien. Mais il y avait comme un vide au fond de moi. Et j’étais dans l’obligation de combler ce vide. Tout en restant le petit délinquant que j’étais, j’enchaînais les conquêtes amoureuses. Les coups d’un soir me permettaient d’oublier qui j’étais réellement : un Dawson. Un Dawson qui était mal dans sa peau et qui recherchait comment vivre.
Mes parents en avaient marre de voir leur fils dépérir. Ils voulaient retrouver le petit garçon qui avait la joie de vivre, celui qui aimait partir à la découverte de nouvelles choses. J’avais beau leur dire que j’avais vingt-deux ans et que je faisais ce que je voulais de ma vie, ils s’en contre-fichaient : ils s’étaient mis dans la tête que la campagne me ferait le plus grand bien. La nature me ferait réfléchir à ces dernières années, à celles que j’avais foutues en l’air.
Une semaine après que leur décision soit prise, je me retrouvais devant ce fichu panneau qui souhaitait la bienvenue à tous les nouveaux arrivants. Comme si j’étais le bienvenu dans une ville où les habitants détestaient le nom de Dawson ! La seule personne qui pouvait se réjouir de mon arrivée était cette belle blonde que j’avais laissée quelques années plus tôt. Même si j’avais l’intention de ne pas rester éternellement, j’allais tout de même rattraper ces années perdues. Et ensemble, nous allions défendre et faire revivre le nom des Dawson.